France - Nouvelle-Zélande, le dernier espoir

Dominée et battue par l'Irlande (24-9) la semaine dernière, l'équipe de France défie la meilleure équipe de la planète, la Nouvelle-Zélande, en quarts de finale de la Coupe du monde (21h). Les All Blacks, qui n'ont perdu que trois matches depuis leur titre mondial en 2011, sont les grands favoris. Après quatre années sans grand résultat, le XV de France voit dans ce match "perdu d'avance" l'occasion d'écrire une page d'histoire, dans une rencontre qui pourrait être la dernière des Dusautoir, Papé et autres Mas, avec l'ambition de briller enfin et redonner des couleurs à un jeu très pâle.
L'équipe de France est toujours meilleure lorsqu'elle est dans la peau de l'outsider, dit-on souvent. Si c'est le cas ce soir, personne ne va la reconnaître. Car jamais sans doute les Bleus n'ont semblé autant en manque de solutions pour renverser "l'Everest" néo-zélandais, comme l'appelle Thierry Dusautoir. Un jeu décousu et en manque de continuité, des lignes arrières qui ne font pas la différence, un pack passé à la moulinette irlandaise en 2e période, quel espoir peut entretenir l'équipe de France face aux All Blacks ?
Le passé au soutien
Il ne faut pas chercher la lumière du côté des quatre années écoulées, avec une moyenne de 1.7 essais marqués par match. C'est plus loin dans le passé qu'il faut regarder. En 55 rencontres, l'équipe de France a fait tomber à douze reprises ces Néo-Zélandais, soit 21% de victoires. Ce n'est pas autant que l'Afrique du Sud (38%) ou l'Australie (27%), mais c'est un ratio qui fait rêver bien des équipes sur la planète. Les deux victoires en Coupe du monde (demi-finale 1999 et quarts de finale 2007) pour quatre défaites attestent encore davantage qu'impossible n'est pas français. Mais pour devenir possible, la victoire doit passer par une révolution sur le pré.
"Il faudra être virulent, dès le début", assène Guilhem Guirado, le talonneur tricolore. "Contre l'Irlande, il y a eu beaucoup d'abnégation, de virulence, mais ça ne suffit pas", note Yoann Maestri. "On va essayer de mettre une grosse intensité dès le début pour montrer qu'on est présent. Il faudrait marquer très vite", souligne Wesley Fofana. Pour mettre en place ces intentions, le XV de France a besoin du ballon. Cela n'avait pas été le cas contre les Irlandais la semaine dernière. Et il faudra bien l'utiliser, ce qui n'a été que rarement le cas ces quatre dernières années. Avec la titularisation de Bernard Le Roux en 3e ligne aile, Philippe Saint-André espère avoir placé un joker susceptible de faire basculer la conquête dans le bon sens, alors que celle d'Alexandre Dumoulin au centre doit donner de la continuité et du rebond au jeu offensif.
D'infimes failles
L'espoir de victoire, si minime soit-il, repose aussi sur les quelques carences affichées par les All Blacks depuis le début de la Coupe du monde. Trois cartons jaunes, 80 ballons perdus (soit le pire résultat des quarts de finalistes), une mêlée loin d'être souveraine et privée en plus de l'expérimenté Woodcock blessé, la formation de Steve Hansen n'a pas toujours brillé. Mais elle a mis plus de 170 points en quatre rencontres. Et si les Français ont peur de "prendre une valise", la Nouvelle-Zélande craint l'inattendu. Et les joueurs ont travaillé en conséquence: "Nous devons progresser autour des regroupements et sur les points de rencontre. Nous allons nous focaliser là-dessus", a prévenu le troisième ligne All Black Jerome Kaino.

Face à la vitesse, la puissance, l'organisation et la talent individuel des Kiwis, l'équipe de France sait ce qui l'attend face à une formation "qui tient le ballon, qui a énormément de continuité dans le jeu. On sait qu'en défense ce sera plus dense, plus rapide que ce qu'on a vécu ce week-end. On a vu qu'on avait loupé pas mal de premiers plaquages, là ça fera encore plus mal", a prévenue Guilhem Guirado. "On va essayer de faire ce que l'Irlande nous a fait, en jouant à une passe, deux passes, mais en agressant la ligne d'avantage." Wesley Fofana se méfie d'un écueil: Il ne faut pas jouer partout non plus, ne pas 'se cramer' contre les Blacks. Ils n'attendent que ça, en contre ce sont peut-être les meilleurs".
"Rien à perdre"
Pourtant, c'est bien cela que redoute les Néo-Zélandais, comme le glissait Steve Hansen cette semaine: "(Le jeu français) était basé sur le flair, parmi les lignes arrières, et un paquet d'avants très physique. Je ne suis pas sûr qu'ils (les Français) aient encore ce même flair avec ce Top 14, où le jeu est plutôt restrictif et essentiellement basé sur le physique. Je sais qu'ils essaient de retrouver ce flair. Et ils y arrivent lorsqu'ils lâchent les chevaux".
Piège d'avant-match ou véritable crainte ? En tout cas, Yoann Maestri, le combattant de la 2e ligne, n'est pas prêt à s'avouer vaincu: "Si t'es pas convaincu de tes forces, tu restes dans ton vestiaire. Il faut garder une part de crédulité, de folie", a-t-il renchéri. "Sinon, on reste chez nous, on donne le match aux Blacks, ça nous fait un match de moins et on va faire un week-end tranquillou. Mais c'est pour ce genre de défi qu'on joue." Et Wesley Fofana ajoute: "Même si on a peu de chances, d'après tout ce que l'on entend, on va essayer de les rentabiliser au maximum. On n'a pas peur de la déroute, on n'a rien à perdre".
Vidéo: les Bleus misent sur le mental
Les équipes
Nouvelle-Zélande: B. Smith - Milner-Skudder, C. Smith, Nonu, Savea - (o) D. Carter, (m) A. Smith - McCaw (cap), Read, Kaino - Whitelock, Retallick - O. Franks, Coles, Crockett
Remplaçants: Mealamu, Moody, Faumuina, Vito, Cane, Kerr-Barlow, Barrett, S.B. Williams
France: Spedding - Nakaitaci, Dumoulin, Fofana, Dulin - (o) Michalak, (m) Parra - Le Roux, Picamoles, Dusautoir (cap) - Maestri, Papé - Slimani, Guirado, Ben Arous.
Remplaçants: Szarzewski, Debaty, Mas, Chouly, Nyanga, Kockott, Tales, Bastareaud